Dans le domaine industriel, nous savons tous que la performance d’une entreprise se mesure avant tout sur le terrain. Le Gemba représente précisément ce lieu stratégique où nous créons concrètement la valeur ajoutée pour nos clients. Ce terme japonais, issu du Toyota Production System, désigne l’endroit où se déroulent véritablement les opérations de production. Nous parlons ici des ateliers de fabrication, des lignes d’assemblage, mais aussi des bureaux d’études ou des zones logistiques. L’approche Gemba s’inscrit dans une philosophie plus large appelée San Gen Shugi, qui repose sur trois piliers fondamentaux : le lieu réel (Gemba), les objets réels (Gembustsu) et les données réelles (Gemjitsu). Cette méthode exige de nous une observation directe sur le terrain, en manipulant physiquement les pièces défectueuses et en travaillant avec des données factuelles chiffrées. Nous constatons régulièrement que cette approche pragmatique permet d’identifier rapidement les dysfonctionnements et d’apporter des solutions concrètes, adaptées à la réalité opérationnelle de nos processus industriels.
Observer le terrain pour distinguer valeur ajoutée et gaspillage
Nous avons appris à catégoriser systématiquement les activités de production en trois groupes distincts pour mieux piloter nos opérations. Les tâches à valeur ajoutée constituent le cœur de notre métier : il s’agit des opérations pour lesquelles nos clients acceptent de payer, celles qui transforment directement la matière première en produit fini conforme à leurs attentes. Lors de nos visites terrain, nous identifions également les tâches sans valeur ajoutée nécessaires à l’entreprise, comme les contrôles qualité ou les opérations administratives obligatoires. Ces activités ne créent pas directement de valeur pour le client, mais restent indispensables au bon fonctionnement de notre organisation.
La troisième catégorie regroupe les véritables gaspillages, appelés mudas dans le vocabulaire Lean. Ces activités n’apportent aucune valeur au client et pénalisent notre rentabilité. Nous rencontrons fréquemment des exemples concrets : déplacements inutiles, stocks excessifs, temps d’attente entre deux opérations ou surproduction. Dans nos ateliers, nous avons mesuré que ces gaspillages peuvent représenter jusqu’à 30 à 40% du temps de travail total. Cette réalité nous pousse à structurer nos observations terrain avec rigueur, en utilisant des outils comme le flux unitaire pour optimiser notre production. L’objectif reste constant : maximiser le temps consacré aux opérations à valeur ajoutée et réduire progressivement tout ce qui n’en génère pas.
| Type d’activité | Perception client | Impact rentabilité | Action Lean |
|---|---|---|---|
| Valeur ajoutée (VA) | Client prêt à payer | Génère la marge | Optimiser et sécuriser |
| Non VA nécessaire (NVAE) | Client non concerné | Coût incompressible | Minimiser |
| Non VA gaspillage (NVA) | Client n’en veut pas | Pénalise la marge | Éliminer |
La pratique du Gemba Walk pour comprendre les problèmes réels
Nous avons intégré dans nos routines managériales cette pratique consistant à nous rendre régulièrement sur le terrain pour observer directement le déroulement des opérations. Le Gemba Walk n’est pas une simple visite d’inspection, mais une démarche structurée d’observation et d’écoute active. Nous encourageons nos responsables, du chef d’équipe au directeur industriel, à consacrer du temps à ces tournées terrain pour échanger directement avec les opérateurs. Cette approche permet d’obtenir des informations sans filtre, contrairement aux remontées d’information classiques qui traversent plusieurs niveaux hiérarchiques.
Dans nos usines, nous organisons généralement ces visites selon un planning défini, en ciblant des zones spécifiques ou des processus critiques. L’objectif principal consiste à identifier les difficultés rencontrées par les équipes et à comprendre les causes profondes des dysfonctionnements. Nous adoptons systématiquement une posture bienveillante, en évitant absolument toute recherche de coupable. Cette attitude favorise la confiance et encourage les collaborateurs à exprimer ouvertement leurs problèmes quotidiens. Nous utilisons souvent le Jidoka pour éliminer les erreurs en production, complément naturel du Gemba Walk dans notre démarche qualité.
Les informations collectées lors de ces visites alimentent directement nos plans d’action d’amélioration continue. Nous impliquons activement les opérateurs dans la proposition de solutions, car ils connaissent mieux que quiconque les subtilités de leur poste de travail. Cette innovation participative génère des résultats concrets : nous avons constaté des gains de productivité de 10 à 15% sur certaines lignes après mise en œuvre des suggestions terrain. Les tournées Gemba s’avèrent également précieuses dans le cadre de projets DMAIC, permettant au chef de projet de se familiariser avec le produit, le processus réel et les équipes concernées avant d’engager des modifications.

Ancrer la démarche d’amélioration dans le quotidien opérationnel
Nous savons par expérience que la réussite d’une démarche Lean repose sur l’engagement de tous les niveaux de l’organisation. Le concept de Gemba nous rappelle constamment que les meilleures décisions se prennent au plus près de l’action, en s’appuyant sur des faits observables et mesurables. Nous avons structuré nos processus d’amélioration autour de cette réalité terrain, en créant des boucles courtes entre l’observation, l’analyse et l’action. Cette méthode s’oppose radicalement aux décisions prises uniquement sur la base de tableaux de bord éloignés de la réalité opérationnelle.
Dans notre pratique quotidienne, nous combinons le Gemba Walk avec d’autres outils Lean comme le management visuel de projet en Obeya. Cette synergie renforce la cohérence de notre système de production et facilite la communication entre les différents services. Nous organisons des points terrain hebdomadaires, durant lesquels nous passons en revue les indicateurs de performance directement sur les zones de production. Cette proximité avec les opérations nous permet d’identifier rapidement les dérives et d’ajuster nos priorités en fonction des contraintes réelles. Les résultats parlent d’eux-mêmes : nous avons réduit nos délais de traitement des non-conformités de 40% en moyenne depuis la mise en place systématique de ces pratiques. Le Gemba reste ainsi notre boussole opérationnelle, nous guidant vers une performance industrielle durable et centrée sur la satisfaction de nos clients finaux.
Testez vos connaissances
Vérifiez votre compréhension des concepts Gemba et Gemba Walk
Que représentent les trois piliers du San Gen Shugi ?
Quel pourcentage du temps de travail total peuvent représenter les gaspillages (mudas) dans les ateliers selon l’article ?
Quelle est la différence principale entre une tâche sans valeur ajoutée nécessaire et un gaspillage ?
Quel gain de productivité a été observé sur certaines lignes après mise en œuvre des suggestions terrain issues du Gemba Walk ?





