Nous avons récemment dû prendre une décision stratégique concernant notre système ERP. Avec l’annonce de la fin de support de SAP ECC, la question de migrer vers S/4HANA s’est imposée comme une priorité. Après 25 années passées à optimiser des systèmes de production, nous savons qu’une telle transition représente bien plus qu’une simple mise à jour technique. C’est une transformation profonde qui mérite une analyse rigoureuse des différences entre ces deux plateformes.

Architecture et performances : le bond technologique de S/4HANA

La différence fondamentale entre SAP ECC et S/4HANA réside dans leur architecture technique. SAP ECC repose sur une base de données relationnelle traditionnelle, tandis que S/4HANA exploite la puissance du traitement in-memory. Cette évolution n’est pas anodine pour ceux d’entre nous qui travaillent quotidiennement sur des ordres de fabrication et des planifications complexes.

Dans notre atelier, nous avons constaté que les temps de traitement des MRP (Material Requirements Planning) pouvaient parfois s’étendre sur plusieurs heures avec ECC, compromettant notre réactivité face aux changements de planification. S/4HANA promet de réduire ces délais de manière drastique, parfois jusqu’à un facteur de compression de 10 à 100 fois pour certains processus critiques.

Cette architecture in-memory permet également de traiter des volumes de données considérables en temps réel, ce qui change complètement la donne pour les analyses de production. Fini le temps où nous devions attendre la nuit pour lancer des rapports d’analyse sur les indicateurs de performance industrielle.

Pour les responsables de production comme nous qui surveillons constamment les taux de rendement synthétiques (TRS), cette capacité d’analyse instantanée représente un avantage compétitif majeur. Nous pouvons désormais ajuster nos paramètres de production sans attendre les rapports du lendemain.

Simplification du modèle de données et impact sur les processus métier

Notre expérience avec les systèmes ERP nous a appris que la complexité est souvent l’ennemie de l’efficacité. Avec ECC, nous avions l’habitude de jongler entre différentes tables et structures de données, notamment pour les processus financiers et logistiques. S/4HANA opère une refonte complète du modèle de données qui simplifie considérablement cette architecture.

Un exemple concret concerne la gestion des données financières. Dans ECC, les tables FI et CO étaient séparées, nécessitant des réconciliations régulières. S/4HANA unifie ces données dans un Universal Journal, éliminant les incohérences qui pouvaient survenir entre comptabilité financière et analytique. Pour ceux qui, comme nous, coordonnent régulièrement avec les services financiers sur les coûts de production, cette unification représente un gain de temps considérable.

Cette simplification s’étend également aux processus de gestion des nomenclatures et des gammes de fabrication, essentiels dans notre quotidien industriel. Les principaux changements incluent :

• Élimination des tables d’index et d’agrégats redondants
• Fusion des données transactionnelles et analytiques
• Simplification des modèles de maintenance des données de base
• Réduction drastique du nombre de tables nécessaires aux processus métier

Cette architecture allégée facilite non seulement la maintenance du système, mais permet également d’implémenter plus facilement les méthodologies Lean que nous appliquons déjà dans nos ateliers. La transparence accrue des données favorise l’identification des gaspillages et l’optimisation continue des processus.

Interface utilisateur et expérience digitale

Après des années passées à former des équipes sur l’interface SAP GUI d’ECC, nous devons reconnaître que son ergonomie datée représentait un frein à l’adoption, particulièrement pour les jeunes collaborateurs. S/4HANA marque une rupture nette avec l’introduction de SAP Fiori comme nouvelle expérience utilisateur.

Cette interface moderne, responsive et intuitive s’adapte aux différents appareils et suit les codes des applications grand public. Pour nos équipes habituées aux transactions complexes d’ECC, ce changement nécessite un temps d’adaptation, mais offre rapidement des gains de productivité significatifs.

Les différences d’expérience utilisateur se manifestent à plusieurs niveaux :

1. Navigation simplifiée basée sur les rôles et les tâches spécifiques de chaque utilisateur
2. Tableaux de bord personnalisables avec indicateurs de performance en temps réel
3. Accès mobile aux fonctionnalités critiques, idéal pour les interventions sur le terrain
4. Intégration native des fonctionnalités analytiques dans les transactions opérationnelles

Pour nos équipes de maintenance et nos opérateurs en atelier, cette mobilité représente un atout majeur. La possibilité de consulter des ordres de travail ou de signaler des pannes directement depuis les lignes de production accélère considérablement notre réactivité face aux aléas.

L’avenir industriel avec S/4HANA : au-delà de la migration technique

La transition vers S/4HANA n’est pas qu’une migration technique imposée par l’échéance de 2027 (ou 2030 avec extension). C’est une opportunité de repenser nos processus industriels à la lumière des nouvelles capacités offertes.

Avec notre expérience dans l’accompagnement des changements technologiques, nous savons qu’il faut voir au-delà des perturbations initiales. Les fonctionnalités avancées de S/4HANA en matière d’intelligence artificielle et d’Internet des Objets ouvrent des perspectives qui étaient inaccessibles avec ECC.

La maintenance prédictive, l’optimisation automatique des plannings de production, ou encore l’analyse prédictive des défaillances qualité deviennent des réalités opérationnelles plutôt que des concepts théoriques. Pour les industriels que nous sommes, ces capacités représentent un levier majeur d’amélioration de notre performance globale.

La migration vers S/4HANA nécessite certes un investissement significatif, mais l’alternative de rester sur une plateforme en fin de vie comme ECC expose à des risques croissants en termes de support, de sécurité et de compétitivité. Dans notre secteur où la précision des prévisions et la fiabilité des équipements sont cruciales, ces considérations pèsent lourd dans la balance décisionnelle.